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Monument à la mémoire des morts du maquis Camille, Plainefas, la commune de Saint-Martin-du-Puy (Nièvre). Les noms d’André Rondenay et d’Alain Grout de Beaufort y figurent en premier, preuve que ces envoyés de Londres furent considérés par les maquisards comme étant des leurs. |
Deux mois d’une action multiforme dans les maquis du Morvan.
Progressivement se concentrèrent au maquis "Camille" beaucoup de responsables de la Résistance et de gros moyens matériels. Rondenay, le DMR devenu DMZ, Grout de Beaufort, officier d'opérations du BOA, Alex Katlama ("Ratissoire"), responsable du BOA de la Nièvre, Paul Bernard ("Camille"), le chef du maquis, Jean Longhi (« Grandjean »), chef de tous les maquis de la Nièvre, les officiers des missions alliés Jedburgh et SAS, même s'ils ne séjournent pas toujours dans ce maquis. Les liaisons radio avec Londres fonctionnaient en permanence. André Rondenay séjourna dans le Morvan du 7 juin au 23 juillet 1944. Durant ces deux mois de présence, ses actions furent multiples. Il continua d'exercer ses responsabilités de délégué militaire et resta en contact permanent avec Londres, effectuant dans ce cadre de multiples déplacements dans les départements et vers la capitale. Il réceptionna et distribua les armes et l’argent des parachutages qu’il demandait par ses liaisons directes avec Londres. Parallèlement, il déploya une activité tous azimuts pour renforcer les maquis du Morvan et coordonner leur action, à laquelle il participa dans tous ses aspects : instruction des maquisards, organisation d'un service sanitaire et de chirurgie au maquis, exécution des plans de sabotage (Vert, Violet, Grenouille, Polygone) sur le réseau ferré (ligne PLM et lignes secondaires) et fluvial (canal de Bourgogne et canal du Nivernais), réception de parachutages d’armes et de munitions. Enfin, avec son équipe, il participa à trois reprises à des combats : le 12 juin dans les rues de Lormes, deux jours plus tard à Sainte-Marie, à l’étang du Merle, ou l’accrochage coûta la vie à François Fouquat et Pierre Briout, deux des saboteurs de la mission Patchouli venus avec Rondenay dans le Morvan, les 25 et 26 juin lors de l'attaque du maquis Camille au camp de Vermot par 800 Allemands et "Russes blancs".
Notice technique pour l’instruction des saboteurs ferroviaires. |
Violent conflit à propos du Morvan entre le DMR Rondenay et le Comac
Qu'on l'appelle "Réduit du Morvan", "Groupe Morvan" ou "Hérisson du Morvan", la coordination des maquis du Morvan fut la source de désaccords profonds en juin et juillet 1944, entre Londres et Alger d'une part, le Comac du CNR d'autre part. Ils traduisaient deux conceptions antinomiques du commandement de la Résistance. En mission au service de Londres au sein de la Résistance intérieure, dispensateur des armes et de l'argent, doté d'un caractère bien trempé, Rondenay concentra sur sa personne les tensions et les conflits. Par ses instructions, De Gaulle avait prévu que le DMR recevrait ses ordres du général Koenig, commandant en chef des FFI, à Londres. Il s’agissait pour de Gaulle d’affirmer la souveraineté nationale vis-à-vis du haut commandement allié ; mais aussi de marquer la prééminence du Comité d'Alger sur le Conseil national de la Résistance, et surtout son Comité militaire, le Comac. En effet, celui-ci avait envoyé des instructions aux états-majors départementaux, affirmant que les FFI étaient placés sous la haute autorité du Conseil national de la Résistance. Le désaccord était donc total entre les conceptions du Comac qui entendait que le DMR lui soit soumis, et le DMR qui avait la claire consigne de n'avoir à rendre compte qu'à Londres et Alger. Le conflit se cristallisa à propos de la nomination d’un commandant unique des maquis du Morvan. Le Comac avait son candidat, le colonel Bertrand (« Dupin »). Rondenay le refusa, soutenu par les chefs du maquis Camille, par Koenig et par Chaban-Delmas. Le conflit dura un mois, paralysa l’unification, exacerba les passions, en particulier entre Bertrand de Vogüe au Comac et Rondenay. Le conflit fut à l’ordre du jour de plusieurs réunions du Comac où Rondenay fut mis en accusation et où Chaban-Delmas dut venir prendre sa défense. Soutenu par quatre télégrammes de Koenig. Rondenay l’emporta, mais les ressentiments à son égard furent intenses.
Dessin réalisé par un maquisard. Parachutage de jour en août 1944 dans le Morvan. |
Rondenay identifié par l’agent double Henri Dupré
Dans ses fonctions, Rondenay avait d’innombrables contacts, et il fut identifié par un agent double, Henri Dupré, en apparence adjoint du commandant FFI de la région P3 (Aube-Yonne-Nièvre), en réalité agent de l’Abwehr depuis 1940. Pour livrer Rondenay et Grout de Beaufort aux Allemands, la subtilité de la manœuvre de Dupré consista à s’appuyer sur l’opposition entre le Comac et Rondenay. Il fit passer Rondenay pour un traitre et affirma que le responsable FFI de P3, Mathelin, dont il était l’adjoint, avait reçu de Londres l’ordre d’éliminer Rondenay. Quatre réunions furent organisées à Sens et dans le Sénonais en juin et juillet, avec des responsables locaux de la Résistance, visant à les persuader de l’ordre reçu d’éliminer Rondenay. Mais Dupré ne parvint pas à ses fins car il y eut toujours un ou plusieurs résistants pour s’opposer à ses projets. Le 17 juillet 1944, il monta un guet-apens à Auxerre en convoquant une réunion à laquelle Rondenay et Grout de Beaufort devaient assister, dans un hôtel cerné par la Gestapo. Mais Rondenay ne vint pas. Le chef des FFI de l’Yonne, Marcel Choupot, et le responsable de l’OCM, Marcel Jacquelin furent capturés et fusillés.
A Auxerre, l’agent double Henri Dupré monta un guet-apens qui échoua à capturer André Rondenay, le 17 juillet 1944. |
Le piège de la Gestapo
André Rondenay, son épouse Solange, Christiane Boulloche et Alain Grout de Beaufort, quittèrent le maquis "Camille" le 23 juillet, séjournèrent à Nevers, et arrivèrent à Paris le 25 juillet au soir. La reconstitution de l’emploi du temps de Rondenay les 26 et 27 juillet montre qu’il eut de très nombreux rendez-vous avec divers responsables (dont Chaban-Delmas et Bourgès-Maunoury), ses préoccupations majeures étant les réceptions de parachutages et les attaques dont il était l’objet au sein du Comac. Rondenay fut arrêté le 27 juillet 1944 entre 11h 15 et 11h 30 à la station de métro La Muette, par des agents du Sipo-SD qui étaient donc informés de sa présence et le conduisirent rue des Saussaies. Alain de Beaufort fut arrêté à l'entrée du métro Porte d'Auteuil à 11h, par des miliciens qui lui tirèrent dessus alors qu'il tentait de s'enfuir en courant. Ils furent ensuite livrés aux Allemands. L’entourage des deux hommes fut frappé eux aussi. Rondenay fut interrogé toute la nuit du 27 au 28 juillet, rue des Saussaies, où il fut détenu deux ou trois jours, puis deux ou trois jours encore avenue Foch avant d'être incarcéré, le 1er ou le 2 août, à la prison de Fresnes, où son camarade Grout de Beaufort était lui aussi détenu.
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